Artistes
Programme
Dmitri Chostakovitch (1906 – 1975), Quintette pour piano et cordes Op.57 (35’)
1. Prélude, lento – 2. Fugue, adagio – 3. Scherzo, allegretto – 4. Intermezzo, lento – 5. Finale, allegretto
Arnold Schönberg (1874 – 1951), La Nuit transfigurée Op.4 (32’)
L’Académie se réunit pour allier le mystère et la force du Quintette de Chostakovitch, monument russe. Puis elle plonge dans le secret de la nuit, celle transfigurée par Schönberg pour une amoureuse.
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À écouter sur France Musique :
| François Salque est invité dans Guitare, guitares, par Sébastien Llinares.
| Les Grands Entretiens de Michel Béroff, par Philippe Cassard.
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Restaurant partenaire (réservation obligatoire avant le 28 août) :
ETCHEHANDIA
15 Place du Jeu de Paume, Espelette – 05 59 52 72 02
Service à 19h00 – Tarif menu partenaire du festival : 30€ (entrée + plat)
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Le programme musical
Avant-guerre, les jeunes musiciens du Quatuor Beethoven recevaient les conseils de Dimitri Chostakovitch pour interpréter ses Quatuors. Devenus amis, ils lui demandèrent d’écrire un quintette pour le jouer, avec lui au piano, et faire le tour des salles de Russie. L’œuvre fut créée le 23 novembre 1940 au conservatoire de Moscou. Chostakovitch eut souvent des problèmes avec la censure soviétique mais ce Quintette reçut en 1941 le Prix Staline. Avant cela, les critiques avaient été rudes pour le compositeur. Après son opéra, Lady Macbeth, en 1936, la Pravda avait écrit « Le chaos remplace la musique » reprochant à cette œuvre son formalisme petit-bourgeois, ses personnages bestiaux et vulgaires. Il ira jusqu’à être décrété « ennemi du peuple » et échappa de peu à l’assassinat ou la déportation. Ce Quintette est-il une réflexion sur la terrible sagesse de l’autocensure ? Sur une introspection protectrice ? C’est possible. C’est avec cette œuvre qu’il terminera sa carrière d’interprète. La première partie, après un accord forte du piano, se joue dans une atmosphère très réflexive. La lenteur est de mise, avec une mystique qui entend se placer au-dessus de la bestialité dictatoriale de Staline. Une fugue suit, tout aussi placide, qui va plonger dans les abysses d’un silence métaphysique. Le Scherzo retrouve une certaine rage, obsessionnel, avec l’apparition de petites mélodies faussement populaires. L’Intermezzo replonge dans un recueillement presque froid, ponctué par le violoncelle marchant à pas inflexibles. Le piano, dans une lumière soudaine, continue l’ascension vers un ciel espéré. L’Allegretto final adopte une forme sonate stricte, avec réapparition du thème initial. L’allure est à fois martiale et tranquille, avec quelques songes insolites, bienheureuse résignation.
Arnold Schönberg a vingt-cinq ans lorsqu’il écrit sa Nuit transfigurée. Nourrie de Brahms ou Wagner, elle est représentative de sa première manière, avant le Pierrot Lunaire et l’invention du dodécaphonisme au début des années 20. Terminée en 1899, cette œuvre sera créée à Vienne le 18 mars 1902. Schönberg avait en tête l’idée du poème symphonique, écrire une œuvre sur un « programme », sans qu’elle soit pour autant une musique descriptive. En 1950, il écrit « l’œuvre avait gagné en qualités qui peuvent aussi satisfaire un auditeur ne sachant pas ce qu’elle prétend décrire, ou, en d’autres termes, elle offre la possibilité d’être comprise comme de la musique pure. » Il choisit pour sa Nuit un poème de Richard Dehmel, auteur mystique à la mode, souvent mis en musique, également par Webern, relatant le dialogue entre un homme amoureux et une femme qui lui avoue attendre un enfant d’un autre homme. La première partie évoque les amoureux au clair de lune, la seconde l’aveu de la femme. L’homme réfléchit et, dans la quatrième partie, exprime son amour, plus fort que les conventions. Enfin, une coda évoque la nature et la rédemption par l’amour. Wagner n’est pas très loin. Le premier thème revient, « transfiguré ». La création déclencha un vrai scandale (pour la musique ou le programme ?). Schönberg réalisera en 1917 une version pour orchestre à cordes.